29.01.22 - 22.05.22
Danielle Rombaut. Au-delà du concevable
Tous les jeunes photographes ne sortent pas de l’adolescence. Certain.e.s ont eu une autre vie avant de s’adonner aux joies de l’objectif. C’est le cas de Danielle Rombaut qui, jusqu’en 2019, était fonctionnaire fédérale au SPF Finances. « Je n’étais plus heureuse dans mon travail » confesse-t-elle. « Je voulais faire autre chose, me développer. » Elle prend alors une période d’interruption de carrière et décide d’explorer plusieurs secteurs qui l’ont toujours intéressée : cours de photographie, cours sur l’antiquité, cours de garnisseur... Très vite, les cours de photographie qu’elle débute en 2019 chez LBC Mortsel (sa ville d’origine, près d’Anvers) l’accaparent totalement et lui donnent envie d’aller plus loin. Elle s’inscrit alors à une autre formation pour adultes chez Encora Berchem et décide de se consacrer totalement à la photographie.
En juillet 2021, elle découvre dans les médias l’ampleur hallucinante des inondations en Wallonie, particulièrement entre Verviers et Liège. Sept semaines plus tard, elle se rend à Liège pour une mission photo. En consultant Google Maps, elle se rend compte qu’elle ne sera qu’à une quinzaine de minutes de la région touchée par les inondations massives du 14 juillet. Désireuse de voir comment les choses ont évolué en un mois et demi, elle décide de s’y rendre dans l’après-midi.
Vers 16 heures, elle arrive à Pepinster, l’une des communes les plus durement touchées. Elle raconte : « Je passe devant le parking du Delhaize et vois des dames dans une laverie mobile spécialement construite à cet effet. Cela ressemble à une image d’un pays du tiers monde où les femmes font leur lessive à l’extérieur ».
Coincée dans l’embouteillage que vivent les habitants de la région depuis la mi-juillet en raison de la coupure de nombreuses routes, elle observe les lieux, les gens puis finit par se garer dans une impasse au bord de la Hoëgne pour revenir à pied. Très vite, un homme sort de chez lui. « Il voulait discuter. Il avait acheté sa maison cinq ou six ans plus tôt, après un divorce et avait presque terminé la rénovation. En 24 heures, tout son rez-de- chaussée a été inondé et il a tout perdu. » Mais « il faut continuer, il faut » répète cet homme qui se dit content de pouvoir aller à son travail durant la journée mais se prend un coup de massue chaque soir en rentrant chez lui.
Très vite, la photographe rencontre d’autres personnes qui viennent à elle, ont besoin de parler. De ce qu’elles ont perdu, de la peur d’une nouvelle averse, d’une élévation du niveau d’eau de la rivière, d’une autre catastrophe.
Sept semaines après les inondations, les voitures encastrées les unes dans les autres, les façades sur le point de s’effondrer, les monceaux de déchets donnent toujours une impression de scènes de guerre.
Son appareil photo en bandoulière, Danielle Rombaut poursuit son chemin, croisant de nombreux habitants. « Les gens ont besoin de parler. Et moi aussi » explique-t-elle. « Ils n’ont absolument aucune objection à être photographiés. »
Peut-être parce que cette photographe ne fait pas que passer en coup de vent. Elle qui est arrivée ici un peu par hasard, décide de loger dans la région et de poursuivre son exploration le lendemain. Puis de revenir le week-end suivant. Pour raconter, rencontrer, immortaliser et partager à travers ses images.
Des images qui dégagent une étrange beauté en même temps qu’un sentiment de perte absolu que la photographe a su capter avec intelligence et sensibilité.