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Exposition

26.09.20 - 31.01.21

Présenté à la fin
du Parcours découverte
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Peter Mitchell. Nouveau démenti de la mission spatiale Viking 4

Si à la lecture de ce titre, l’on se sent quelque peu perdu, le voir accolé à ces photographies déconcerte plus encore. Quel est le lien entre des images de villes anglaises et de leurs habitants – Leeds principalement, mais aussi Sheffield et Londres – et une mission spatiale Viking ? L’humour britannique, peut-être ? Bien, mais encore ?

Né en 1943 à Eccles, Greater Manchester, Peter Mitchell débute comme dessinateur pour le ministère du Logement. Il intègre le Hornsey College of Art de Londres quelques années plus tard et s’installe à Leeds en 1972, où il travaille comme graphiste et typographe. En 1973, il trouve un emploi de chauffeur de camion dans une entreprise et sillonne régulièrement la ville de Leeds, qu’il décide de photographier. Nouveau démenti sur la mission spatiale Viking 4 regroupe ces images prises entre 1974 et 1979 et dévoile une ville tentant de se maintenir à travers les changements économiques, et les constructions et destructions qu’ils occasionnent. Peter Mitchell photographie les petits commerces, les devantures en friche, les manufactures à la dérive et les gens ordinaires d’une classe plutôt ouvrière.

Point d’ironie, ni de condescendance en ses images ; bien au contraire, photographiés de manière très formelle à l’aide d’un escabeau, les propriétaires ou les employés posent fièrement devant leur commerce et Mitchell les présente tels des héros d’un conte moderne. Chaque photographie est légendée d’un extrait de son journal de bord. Ces notes, au ton léger voire bon enfant, teintées d’humour et d’autodérision, identifient chaque lieu et chaque personne. Ces inconnus deviennent tout à coup plus familiers. Nous apprenons ainsi que Keith et Sandra sont les tenanciers d’un pub chaleureux, que Leslie a un chien aux noms variés, ou encore que Sindey et James, tourneurs sur bois, vont bientôt devoir fermer leur boutique et n’ont pas trouvé re- preneur, même pour une somme modique. Autant d’informations qui frisent parfois l’anecdote mais qui en disent souvent beaucoup sur l’histoire de ces habitants, sur leur épaisseur humaine et sur les conséquences pour eux de la mutation de leur ville. Ces photographies de Leeds font évidemment un écho singulier aux paysages indus- triels de la ville de Charleroi : toutes deux ont subi une reconversion économique et une profonde mutation sociale et culturelle. Mais le lien avec Mars peut toujours sembler un peu flou. Peter Mitchell, en fait, s’inspire des théories conspirationnistes en vogue à l’époque et présente sa série comme le résultat d’une mission martienne à Leeds en réaction aux sondes Viking 1 et Viking 2, expédiées respectivement le 20 août et le 9 septembre 1974. Les photographies de Mitchell sont attribuées à de petits bonhommes verts qui découvriraient une ville avec un sentiment comparable à celui de l’Homme (avec un grand « H ») découvrant la planète rouge. Le lien avec cette exploration est renforcé par les grilles de coordonnées de la Nasa entourant les photographies, et par les images de Mars extraites de la mission spatiale qui viennent ponctuer la série.

Lorsque la série Nouveau démenti sur la mission spatiale Viking 4 est présentée en 1979 pour la première fois à L’Impressions Gallery of Photography à York, deuxième galerie photo à avoir ouvert en Angleterre, sous le com- missariat de Val Williams, elle marque de nombreux esprits par l’aspect novateur du style documentaire de Peter Mitchell. Dans un contexte où la photographie couleur occupe très peu les cimaises – il s’agissait de la première exposition en couleur, dans une galerie photographique britannique, réalisée par un photographe britannique –, la série de Mitchell séduit et interpelle les observateurs. Parmi eux un certain Martin Parr, qui confiera ensuite l’influence de l’approche documentaire de Mitchell sur son propre travail.

À travers cette mise en scène novatrice, Peter Mitchell questionne la notion de photographie documentaire de l’époque en faisant du « contre-documentaire » et en endossant le rôle d’un explorateur venant de Mars. Mais ce questionnement s’élargit également à la notion de
photographe observateur extérieur. Peter Mitchell n’est pas un visiteur en transit, il a au contraire photographié Leeds « de l’intérieur » ; pourtant, il nous invite à voir cette série comme le travail effectué par un étranger débarqué de nulle part, et cette petite ville morose voire ordinaire se fait tout à coup intrigante, mystérieuse ; son architecture et ses habitants deviennent aussi étranges que les découvertes tirées d’univers lointains. Nouveau démenti sur la mission spatiale Viking 4 est certes teinté d’humour britannique, mais est loin d’être un constat tout en grisaille ou une représentation cy- nique des villes anglaises et de leurs habitants. Au contraire, Peter Mitchell, tant par l’emploi de couleurs douces et presque pastel – contrastant avec le ciel anglais plombé et gris – que par la tendresse et l’atten- tion de son regard, dresse, avec empathie et respect, le portrait sensible d’une ville mais aussi, au-delà, celui d’une époque.

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