Terminé le 20.09.20
Présenté dans laBoite Noire
Nina Berman et Jon Lowenstein
Triumph of the shill – Nina Berman – 10:21
Prenant Washington D.C. et la Trump Tower de New York comme toile de fond, le court métrage de Nina Berman, Triumph of the Shill, utilise le classique de propagande nazie de Leni Riefenstahl comme plan esthétique pour envisager l’élection et l’investiture de 2017 du président américain Donald J. Trump.
Le film de Berman s’inspire de scènes clés et de motifs visuels du film de Riefenstahl, Triumph of the Will, qui documente la conférence du parti nazi de 1934 à Nuremberg. Commandé par Adolf Hitler, Triumph of the Will, tourné en noir et blanc dramatique, célébrait le pouvoir du Troisième Reich, et présentait Hitler comme un chef suprême, vénéré par les masses aryennes. Dans le film de Berman, les foules en adoration sont toujours présentes aux côtés des symboles contemporains de l’iconographie fasciste. Mais alors que le film de Riefenstahl célèbre le national-socialisme, celui de Berman habite l’espace de la satire noire et du surréalisme absurde. Dans le film de Riefenstahl, Hitler est à bord d’un avion volant à travers des nuages blancs, suggérant spiritualité et puissance divine. Dans le film de Berman, les nuages blancs sont remplacés par un jet de vapeur soufflant d’un tuyau d’égout sur la 5e
avenue avec le gratte-ciel noir de Trump à l’arrière-plan. Dans le film de Riefenstahl, de multiples angles de prise de vue ont capturé chaque mouvement d’Hitler. Dans le film de Berman, Trump n’est jamais vu en chair et en os. Au lieu de cela, il est une masse de pixels projetés sur des écrans devant le Lincoln Memorial, un visage souriant transformé en t-shirt ou une figure de cire grandeur nature. Son discours basé sur la promesse autoritaire d’un retour à un passé glorifié est vivement accueilli par le public américain. Berman enregistre des scènes qui font écho par leur signification et par leur esthétique aux images des partisans nazis au rassemblement de Nuremberg.
Pour ses recherches sur Triumph of the Will, Berman a visité le Centre de documentation de Munich et le site commémoratif du camp de concentration de Dachau. Elle s’est également inspirée de ses propres expériences au fil des décennies en tant que photographe couvrant la politique américaine, la suprématie blanche, le natio- nalisme chrétien et le mouvement des milices.
Lincoln’s Promise – Jon Lowenstein – 9:34
Jon Lowenstein se spécialise dans les explorations documentaires qui confrontent les domaines du pouvoir, de la pauvreté, de la discrimination raciale et de la violence. Par la combinaison de la photographie, de l’image en mouvement, de l’écriture expérientielle et de la poésie, il s’efforce d’obtenir une lecture claire et sans faille de sujets oubliés de l’histoire.
Dans Lincoln’s Promise il suit le parcours du train funéraire du président américain Abraham Lincoln. Le film retrace une partie de l’itinéraire original allant de Washington D.C. à New York en passant par Baltimore et jusqu’à Chicago.
Ce trajet est un prétexte pour aborder les sujets qui interpellent Jon Lowenstein. Abraham Lincoln reste dans l’imaginaire collectif l’homme du 13e amendement des États-Unis, celui par lequel l’esclavage a été aboli en 1865. Il est aussi tristement célèbre par sa mort, assassiné en plein théâtre en avril 1865. C’est donc sur les traces d’une personnalité hautement symbolique que se lance le réalisateur.
Parallèles et constats d’une société toujours fragmentée, en proie aux doutes, aux manifestations, aux injustices, émanent de ce film. Ce sont les témoignages d’Améri- cains désabusés par une société qui leur avait promis la liberté et les images de ce racisme ordinaire présent dans une société « moderne » que nous découvrons. Cela nous amène forcément à nous poser la question, 150 ans plus tard, de l’héritage du 13e amendement.